Dépenses non admises

AuteurDominique Darte - Yves Noel
Pages210-318
210
Partie 2 - Détermination du résultat fiscal
II. Dépenses non admises
A. Frais professionnels
Articles 183 et 49 du CIR.
L’article 183 du CIR renvoie, pour la détermination du montant des revenus soumis à l’impôt des
sociétés ou exonérés dudit impôt, aux règles qui sont applicables aux bénéfices pris en compte
pour l’impôt des personnes physiques et parmi lesquelles figure l’article 49 du CIR.
L’article 49 du CIR prévoit que pour être admises à titre de frais professionnels, les dépenses enga-
gées par la société doivent répondre simultanément aux quatre conditions suivantes :
elles doivent se rattacher nécessairement à l’exercice de l’activité professionnelle (critère de
causalité);
elles doivent avoir été faites ou supportées pendant la période imposable (critère
d’annualité);
elles doivent avoir été faites ou supportées en vue d’acquérir ou de conserver des revenus
imposables (critère de finalité);
elles doivent être justifiées quant à leur réalité et leur montant par le contribuable.
Il ne découle ni de l’article 49 du CIR, ni d’une quelconque autre disposition légale qu’il y a lieu
de considérer une dépense en tant que frais professionnel si elle intervient dans la détermination
des revenus imposables de celui qui a reçu le paiement concordant85.
1. Dépenses se rattachant nécessairement à
l’exercice de l’activité professionnelle
Cette condition implique qu’il doit y avoir un lien direct et nécessaire entre la dépense et l’exercice
de l’activité professionnelle.
Autrement dit, les dépenses qui ne sont pas inhérentes à l’exercice de l’activité professionnelle, ne
sont pas admises au titre de dépenses professionnelles.
2. Dépenses faites ou supportées pendant
la période imposable
Seuls, sont déductibles à titre de frais professionnels, les frais que le contribuable a effectués ou
supportés personnellement en vue d’acquérir ou conserver des revenus imposables.
85 Rapport annuel de la Cour de Cassation de Belgique, 2009, p. 34.
Edi.pro
211
Sont considérées comme ayant été effectuées ou supportées pendant la période imposable, les
dépenses qui, durant cette période, ont été :
payées ou supportées;
ou à défaut, ont acquis le caractère de dettes, ou de pertes liquides et certaines, et sont enre-
gistrées comme telles dans la comptabilité.
Une dette possède un caractère certain lorsque son existence est certaine; elle est liquide lorsque
son montant est connu. En principe, sont exclues des dettes certaines et liquides, les dettes ou per-
tes conditionnelles ou éventuelles, c’est-à-dire celles dont le principe et/ou le montant sont soumis
à des conditions non encore réalisées ou dépendant encore d’un jugement, d’une expertise, etc.
Le Ministre des Finances considère qu’en vertu du principe de l’annualité de l’impôt visé à l’article
360 du CIR, les frais justifiés par une facture qui n’aurait pas été comptabilisée au moment de sa
réception ne peuvent être déduits à titre de frais professionnels de la période imposable ultérieure,
au cours de laquelle est effectué le paiement de ces frais, lorsque ceux-ci se rattachent à la période
imposable au cours de laquelle la facture a été reçue86.
Il ressort de cette réponse que l’article 49, alinéa 2 du CIR ne déroge pas au droit comptable. Cela
implique que le contribuable n’a pas le choix de considérer une dépense comme un frais profes-
sionnel soit pour la période imposable au cours de laquelle le frais a acquis la nature d’une dette
certaine et liquide, soit pour la période imposable au cours de laquelle ce frais a été payé.
La Cour d’appel de Gand (arrêt du 5 octobre 2004) a ainsi refusé la déduction, à titre de frais
professionnels, d’une charge l’année au cours de laquelle celle-ci avait été payée et comptabi-
lisée, au motif que cette charge avait acquis le caractère d’une dette certaine et liquide au cours
d’une année antérieure.
L’article 52bis du CIR instaure un régime fiscal spécifique qui assimile le versement des sommes
en faveur d'un milieu d'accueil collectif de la petite enfance à des frais professionnels moyennant
le respect des conditions suivantes :
1. le milieu d'accueil doit être agréé, subsidié ou autorisé par l'Office de la naissance et de l'en-
fance, Kind en Gezin ou l'Exécutif de la Communauté germanophone;
2. les sommes doivent être versées au milieu d'accueil directement ou par l'intermédiaire de
l'institution compétente mentionnée au 1°, conformément à la réglementation applicable de
la communauté concernée;
3. les sommes doivent être affectées par le milieu d'accueil au financement de frais de fonction-
nement et de dépenses d'infrastructure ou d'équipement, nécessaires à la création, à partir du
1er janvier 2003, de places d'accueil pour enfants de moins de trois ans, qui remplissent les
conditions prévues par la communauté concernée, ou au maintien des places ainsi créées;
4. les sommes ne peuvent pas être utilisées pour le paiement de l'intervention normale des pa-
rents pour la garde de leurs enfants;
5. les sommes pouvant être considérées comme des frais professionnels, ne peuvent pas dépas-
ser, par période imposable 5.250,00 (montant non indexé- montant indexé : 7.900,00
pour l'exercice d'imposition 2014 et 7.990,00 pour l'exercice d'imposition 2015) par place
d'accueil visée au 3°;
6. l'institution compétente doit remettre annuellement un document par milieu d'accueil au
contribuable qui a versé les sommes, par lequel elle atteste que les conditions énoncées
dans le présent article sont respectées et dans lequel elle précise le montant qui a été affecté
à la création ou au maintien de places d'accueil visées au 3° ainsi que le nombre de places
concernées.
86 Bulletin des contributions directes n°787, pp 2429-2431.
212
Partie 2 - Détermination du résultat fiscal
Compte tenu de cette assimilation, les dettes relatives à de tels versements futurs et qui sont comp-
tabilisés via le résultat en fin d’exercice comptable ne peuvent pas encore être considérées comme
des frais professionnels87. Sur la base de l’article 52bis, elles ne seront admises à titre de frais
professionnels qu’au moment du versement effectif desdites sommes.
3. Dépenses faites ou supportées en vue d’acquérir
ou de conserver des revenus imposables
Sont seules admises à titre de frais professionnels, les dépenses qui ont un rapport nécessaire avec
l’acquisition ou la conservation des revenus résultant, pour le contribuable, de l’exercice de son
activité professionnelle.
L’administration n’a pas le pouvoir d’apprécier l’opportunité ou l’utilité des frais que le contribua-
ble a effectués, mais elle peut toutefois vérifier leur existence réelle et en contrôler leur nature.
La jurisprudence rejette la déduction de frais exposés lors d’opérations répondant à des objectifs
purement fiscaux, en dehors de toute autre considération économique liée à la réalisation de
l’objet social de la société.
C’est sur la base de cette jurisprudence que l’administration combat l’utilisation de mécanismes
qui s’assimilent à de véritables destructions de base imposable en rejetant les dépenses faites
dans le seul but de transformer un revenu imposable en un revenu non imposable et d’obtenir une
diminution de la charge fiscale.
C’est par exemple le cas d’une société active dans le secteur de la chimie lorsqu’elle postule, d’une
part, la déduction de frais d’achat d’options « put » et « call » permettant l’acquisition et la cession
d’actions et, d’autre part, l’exemption de la plus-value réalisée sur ces actifs alors que manifes-
tement ces opérations sortent de son objet social (cas tranché par la Cour de cassation dans son
arrêt du 19 juin 2003).
Dans cet arrêt du 3 mai 2001, la Cour de Cassation a précisé que, même si une société commer-
ciale est un être moral exclusivement créé en vue d’une activité lucrative, il ne peut être forcément
déduit de cet état de fait, que toutes ses dépenses ont un caractère professionnel et peuvent être
déduites de son bénéfice brut.
Dans l’arrêt n°191/2009 du 26 novembre 2009, la Cour Constitutionnelle mentionne :
« De ce que l’ensemble du patrimoine d’un contribuable soumis à l’impôt des sociétés forme une
masse unique affectée à l’activité de la société, il suit que c’est le montant total de ses bénéfices
qui constitue la base de l’impôt. Il ne se déduit cependant ni de cette circonstance ni de ce que la
société est une personne morale constituée en vue d’une activité lucrative que le montant de toutes
ses dépenses peut être déduit de celui de ses bénéfices.
En effet, l’article 49 du CIR subordonne la déductibilité en cause à la condition que les frais qu’il
vise soient faits ou supportés en vue d’acquérir ou de conserver des revenus imposables, ce qui
exclut les frais faits ou supportés à d’autres fins telles que celle :
d’agir dans un but désintéressé;
de procurer sans contrepartie un avantage à un tiers;
étrangère à l’activité ou à l’objet social de la société.
87 Document parlementaire 50, 2343/001 p.49. Les travaux parlementaires précisent que des provisions pour risques et charges
liées à des versements futurs ne peuvent également pas être constituées en exonération d’impôt.

Pour continuer la lecture

SOLLICITEZ VOTRE ESSAI

VLEX uses login cookies to provide you with a better browsing experience. If you click on 'Accept' or continue browsing this site we consider that you accept our cookie policy. ACCEPT