Quel avenir pour le droit penal des affaires? deux spécialistes se penchent sur la réforme actuelle et nous disent ce qu'il faudrait vraiment faire pour améliorer le systême .

AuteurLegal News
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Réduction du champ pénal

, « déjudiciarisation de la vie économique » ou, plus fréquemment « dépénalisation de la vie des affaires », ces expressions reviennent sans cesse depuis que le gouvernement a fait de cet objectif un de ses importants chantiers.

Jean-Marie Coulon, premier président honoraire de la Cour d'appel de Paris, s'est penché sur la question et a remis son rapport au Garde des Sceaux à la fin du mois de février. Le Président Coulon n'en est pas à son premier rapport. C'est déjà lui qui, en 1996, avait eu la mission de réfléchir aux règles qui pouvaient être mises en place pour renforcer l'efficacité et la crédibilité de la justice, accélérer les procédures et réguler les flux... douze ans plus tard, on peut se demander si ses préconisations ont eu les effets souhaités.

Cette fois, le groupe de travail avait à se pencher, selon les termes de la lettre de Madame Dati, sur les effets pervers de la pénalisation excessive de la vie économique qui pèse sur l'attractivité de la France. Le Président Coulon, entouré d'un groupe de travail composé d'éminents magistrats (Philippe Courroye, Philippe Ingall-Montagnier...), de professeurs (Yves Chaput, Frédéric Debove, Didier Rebut...), d'avocats (Francis Teitgen, Jean Veil, Olivier Debouzy...) et d'un petit nombre de gens du monde de l'entreprise (quatre membres du groupe sur un total de dix-huit) a rendu sa copie, mais pour quel résultat ?

Maurice Lantourne, avocat associé du cabinet Fried Frank à Paris, spécialiste reconnu des restructurations et du contentieux pénal des affaires et Hervé Témime, pénaliste omniprésent à la fois dans les grandes affaires économiques mais aussi sociales (sang contaminé, Erika, Mont Saint-Odile...) nous livrent sans détours leur analyse du courant actuel de réformes et nous disent ce qu'ils pensent de la manière dont évoluera le droit pénal des affaires sur les prochaines années. u

C'est moins le penal qui va mal que la loi civile qui pose probleme

Maurice Lantourne sait de quoi il parle. Il les a tous vu dé- filer dans son bureau : Bernard Tapie, Loïk Le Floch Prigent, Guy Loudmer, Gérard Longuet... Rompu aux personnalités médiatiques et aux dossiers compliqués, il connaît parfaitement l'imbrication de la procédure pénale dans la vie des affaires. Il connaît également les complexités du pénal et de la finance, comme actuellement dans le dossier Altran. Son premier commentaire prend à contre-pied : « Tous ceux qui se plaignent de la pénalisation excessive du droit des affaires sont aussi ceux qui sont à l'origine du problème. Les dépôts de plainte sont trop fréquents. L'absence de discovery dans le système français engendre un problème permanent en ce qui concerne la recherche de la preuve ».

Maurice Lantourne

Avocat, associé Fried Frank, Paris

Tous ceux qui se plaignent de la pénalisation excessive du droit des affaires sont aussi ceux qui sont à l'origine du problème

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Le problème évoqué ici est double. Il y a d'abord la brèche ouverte par l'adage « le pénal tient le civil en l'état ». Jusqu'à la loi du 5 mars 2007, cette règle devait s'appliquer sans que le juge ne dispose d'un pouvoir d'appréciation. Le résultat qui en a découlé est un engorgement des tribunaux avec des plaintes dont le seul objet était de retarder une procédure civile en cours. La loi du 5 mars 2007 limite certaines possibilités de dépôt de plainte, rend au juge son pouvoir d'appréciation et devrait contribuer à une amélioration progressive. Le second problème concerne le recours trop fréquent à la procédure pénale pour pallier aux difficultés de la recherche de la preuve dans la procédure civile. « On peut résoudre le problème en changeant la loi civile, pas la loi pénale, en changeant les règles de preuve » ajoute-t-il. Hervé Témime, dont la perspective...

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