Répartition des bénéfices

AuteurStéphane Mercier
Occupation de l'auteurIngénieur commercial Solvay U.L.B.
Pages259-303
Edi.pro
259
6. RE PAR TIT ION DE S B ENEFICE S
La répartition des bénéfices représente beaucoup plus qu'une simple distribution des
bénéfices. Elle constitue en effet un instrument important de la politique financière de
l'entreprise.
En effet :
- par la non-distribution d'une partie ou de la totalité de ces bénéfices, elle procure à
l'entreprise des ressources financières nécessaires à son développement et à son
équilibre financier ( c.-à-d. son autofinancement net);
- par la distribution d'une partie ou de la totalité de ces bénéfices, elle rémunère les
capitaux investis dans la société. Dans la mesure où cette rémunération est
satisfaisante, elle se réserve la possibilité de faire appel ultérieurement à de
nouveaux capitaux à risques.
Comme on peut le constater, ces objectifs sont quelque peu contradictoires et l'entreprise
doit s'efforcer de les concilier le mieux possible. Nous vous proposons donc d’examiner
successivement la problématique des réserves indisponibles, puis celle de la distribution
des bénéfices.
6.1. Réserves indisponibles
Le terme « indisponible » signifie que le montant d’une réserve ne peut être « distribué »,
c.-à-d. être attribué pour une utilisation externe de fonds (ce qui se traduit par une sortie
effective de ressources au profit d’une personne extérieure à la société : actionnaire ou
associé, administrateur ou gérant, etc.). Une utilisation interne de fonds reste toujours
possible (un achat d’un élément de stock, un placement de trésorerie, etc. est la
contrepartie logique à l’actif d’un compte de passif, ici « Réserves indisponibles »;
contrairement à une opinion largement répandue, il n’y a aucune raison qu’une « réserve
disponible » soit traduite par l’existence d’un compte de trésorerie d’un montant
équivalent à l’actif).
Il peut exister plusieurs réserves indisponibles :
- en vertu de la loi : la « Réserve légale » (cf. supra), ou encore, la « Réserve
indisponible pour actions propres » (compte 1310 du P.C.M.N.); les autres cas
sont les suivants : réserve indisponible en vue d’apurer une perte prévisible, d’une
part, ou réserve;
- en vertu des statuts : les réserves indisponibles (compte 1311 du P.C.M.N.).
Chapitre 4 – L’affectation du résultat
260
6.1.1. Réserve légale (attention : en cas d’arrondissement du capital à
l’euro)
Les articles 319, 428 et 616 C. Soc. demandent que « Chaque année, les administrateurs
dressent un inventaire et établissent les comptes annuels. Ces comptes annuels
comprennent le bilan, le compte de résultats ainsi que l’annexe et forment un tout. (...)
Les administrateurs établissent, en outre, un rapport dans lequel ils rendent compte de
leur gestion. Ce rapport de gestion comporte un commentaire sur les comptes annuels
en vue d’exposer d’une manière fidèle l’évolution des affaires et la situation de la société.
(...) Il est fait annuellement, sur les bénéfices nets, un prélèvement d’un vingtième au
moins, affecté à la formation d’un fonds de réserve; ce prélèvement cesse d’être
obligatoire lorsque le fonds de réserve a atteint le dixième du capital social. »
La 2e directive européenne121 prévoit que la réserve légale soit constituée par prélèvement
d’un certain pourcentage des bénéfices de l’exercice, diminués des pertes reportées
éventuelles.
Cette solution permet de mettre fin à la controverse de savoir s’il fallait tenir compte des
pertes reportées pour procéder à la dotation à la réserve légale.
6.1.2. Réserve pour actions propres
Le rachat d’actions ou parts propres
L’on croit trop souvent maîtriser cette matière alors qu’une analyse détaillée des textes
montre que la matière est plus difficile à aborder qu’il n’y paraît.
Il nous a paru utile de vous proposer une synthèse des dispositions prévues par le Code
des sociétés, en particulier suite à la loi relative aux participations bénéficiaires des
travailleurs que nous vous avons décrite plus loin.
a) Motivations
Les raisons d’un tel rachat sont multiples. Parmi celles-ci, on citera :
- la volonté de soutenir le cours boursier de son entreprise, un mode de placement, la
volonté de se défendre contre des offres publiques d’achat (O.P.A.);
- l’octroi d’une option d’achat à certaines catégories de personnes (stock options) ou
les prises de participations bénéficiaires (accordées aux seuls travailleurs) sert à
motiver le personnel et nécessite souvent l’achat d’actions;
- la volonté de soutenir le cours de l’action (l’offre diminue pour une même demande,
ce qui induit une variation du prix unitaire à la hausse);
121 v. Deuxième directive 77/91/CEE du Conseil, du 13 décembre 1976, tendant à coordonner pour les rendre
équivalentes les garanties qui sont exigées dans les États membres des sociétés au sens de l'article 58
deuxième alinéa du traité, en vue de la protection des intérêts tant des associés que des tiers, en ce qui
concerne la constitution de la société anonyme ainsi que le maintien et les modifications de son capital (art.
15).
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261
- la modification du pouvoir de contrôle : l’actionnaire qui détient 460 actions sur 1000
n’a pas la majorité absolue; par contre, en cas de rachat de 100 actions propres, il
dispose du contrôle exclusif (460/900 > 50%), puisque les actions ou parts propres
ne donnent pas droit au vote;
- etc.
b) Des origines …
Interdit avant la loi du 5 décembre 1984, le principe des acquisitions de titres propres
trouve sa source dans le droit européen.
c) A nos jours
Nous envisagerons cette matière successivement au niveau du droit commercial, du droit
fiscal et enfin du droit comptable.
Droit commercial
Les articles 620 (S.A.), 657 (S.C.A.) et 321 (S.P.R.L.) C. Soc. fixent les conditions
nécessaires à l’acquisition des propres actions ou parts, par voie d’achat ou d’échange,
directement ou par personne agissant en nom propre mais pour compte de la société.
En résumé :
1. Actions propres / S.A. (Art. 620 et suivants C. Soc.)
- Les actions ou certificats propres acquis ne peuvent pas représenter plus de
20% du capital souscrit.
- Les actions, certificats ou parts bénéficiaires propres doivent avoir été
entièrement libérés.
- L’opération ne peut se faire que s’il existe des bénéfices distribuables au sens
de l’art. 617 C. Soc..
- Une réserve indisponible doit être constituée à hauteur de la valeur comptable
nette des titres (à l’actif).
- Il faut une assemblée générale statuant comme en matière de modification de
l’objet social. Concrètement, cela signifie qu’il faut une première assemblée
générale, avec un quorum de 50%; à défaut, il faudra convoquer une seconde
assemblée qui votera quel que soit le quorum atteint. Dans tous les cas, il faut
une majorité d’au moins 4/5 des voix). Cette décision de l’assemblée n’est pas
nécessaire si les titres propres :
sont destinés au personnel, ou
permettent à la société d’éviter un dommage grave et imminent;
- Art. 626 C. Soc. : le rachat d’actions sans droit de vote implique
automatiquement leur annulation (le capital de la société est réduit de plein
droit). Ce rachat est décidé par une assemblée générale comme en matière de
modification des statuts (il faut une première assemblée générale, avec un
quorum de 50%; à défaut, il faudra convoquer une seconde assemblée qui
votera quel que soit le quorum atteint. Dans tous les cas, il faut une majorité

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